samedi 2 avril 2011

Petite leçon de douleur / Lessons in pain

Elle a fait une entrée fracassante dans ma vie, par un bel après midi d'été, il y a deux ans.
Je la croyais hôte de passage...
Elle ne l'entend pas de cette façon.

Parfois sourde, à peine discernable, au point que je pourrais m'en croire enfin débarrassée.
Parfois, comme cette semaine, envahissante. Agressive. Usante.

Les philosophes grecs disaient que la souffrance et la douleur peuvent être source d'apprentissage.

Il m'a fallu du temps. Il m'a fallu de la patience.
Il m'a fallu aussi me replonger dans ce qu'autrefois j'avais compris d'un point de vue purement intellectuel, et qui désormais est une réalité quotidienne : Algodicée

"Derrière ce mot pompeux se cache un véritable défi pour l’individu. Algodicée signifie la connaissance à travers la souffrance, la connaissance par la souffrance. Elle exige de l’homme de tirer profit de tout, même de la douleur, même des tourments. Tâche difficile, redoutable, on ne peut cependant pas faire l’impasse de la question. Tôt ou tard elle arrive, s’impose. Notre rapport au monde se bâtit avec elle, contre elle. Compagne ou adversaire, elle est présente..." (Alexandre Jollien).

Que m'a appris ma douleur?

Que cette experience n'appartient qu'à moi. Si je devais vous la décrire, j'emploierai des images de glace et d'eclairs, de fulgurances dans un bloc de marbre froid.. Mais aucun autre que moi ne peut la vivre, la ressentir, l'approcher.

Qu'elle fait partie de moi, de ma vie, que je le veuille ou non. Et qu'il est vain de la traiter par le mépris, de la négliger, de vouloir la combattre. Telle une amante éconduite et jalouse, elle se venge alors en coupant tout élan, en envahissant toute ma conscience, jusqu'à ce qu'enfin, je l'écoute.
J'ai donc appris à l'accueillir, à composer avec elle, à ne pas passer outre quand elle se manifeste.

Elle me confronte à mes limites... moi qui pensais que ma volonté n'en avait pas!

Elle m'apprend l'impermanence, l''adaptation, la flexibilité, la créativité... Tout ce qu'il faut déployer de ruses et de chemins de traverses pour continuer à avancer, avec ou malgré elle, et faire ce que je veux ou dois faire.

Elle m'a appris l'indulgence. Enfin je m'autorise à être moins... moins souriante, moins performante, moins active, moins perfectionniste..
Enfin -et peut être est ce là le plus difficile- je m'autorise la possibilité de demander de l'aide... et de l'accepter.

Elle m'a appris la fragilité et le doute.

Et finalement, j'ai appris qu'en intégrant ses limites et ses contraintes, j'arrivais à m'en libérer.

J'ai appris que j'avais gagné: elle est incapable de me détruire ou de m'abattre.

«Rien n’est grave, puisque tout est grave.»
Alexandre Jollien - Extrait de "Le Métier d’homme "
A bientôt

She careened brutally into my life on a fine summer afternoon, two years ago.
I thought of her as a short time guest, just passing through...
She doesn't see it like that.


Sometimes muffled, nigh imperceptible, to the point where I can almostthink she's finally gone.

Sometimes, like this week, invasive. Aggressive. Grinding.

Some Greek philosophers used to say that suffering and pain can be sources of knowledge, can teach us things.
For me, it took time. It took some patience.

It also took a return to a notion I used to understand on an intellectual level, and which is now for me a lived reality, an every day fact: Algodicea
"Behind this pompous word hides a true challenge for any individual.
Algodicea means knowledge through pain, knowledge from pain. It challenges a person to extract some benefic from everything, including pain and suffering.
An arduous task, frightening, but a problem that cannot be neglected .Sooner or later pain arises, asserts itself, and our rapport with the world is elaborated with her, against her.
Companion or opponent, pain is present..." (Alexandre Jollien,
translated from French)


What did my pain teach me?

That it is an experience which is uniquely mine, no one else's. If I
had to describe my pain I would use metaphors, images of ice and
lightning, sudden searing blasts in a cold slab of marble. And no one
else but me can live it, feel it, approach it.


That she - the pain - is a part of me, of my life, whether I want it
or not. That it is futile to try and treat her with contempt, neglect
her, to try and fight her. Like a jealous, spurned lover, she will
then avenge herself by throttling all my energy, by invading my
consciousness until finally I deign to listen to her.

So I have learned to welcome her, to take her into account, to never
push too far when she makes herself known.


She confronts me with my limitations... Me, who used to think my will
was boundless!


She teaches me impermanence, adaptation, flexibility, creativity...
All the tricks I have to deploy, all the oblique meandering paths I
have to follow if I want to be able to continue onwards, forwards,
with her, despite her, to do what I want to do, do what I have to do.


She taught me to be lenient. Finally I can allow myself to be less..
less active, less of a perfectionnist.. to perform less, to smile less


Finally - and this might be the hardest thing - I allow myself the
right to ask for help... and to accept it.


She taught me fragility, and doubt.

Ultimately, I learned that if once took into acount the limits, the
constraints she imposes on me, I could also break free of them.


I learned that I have already won: she cannot bring me down, and
cannot destroy me.


"Nothing is serious, since everything is".
Alexandre Jollien in 'Le Métier d'homme'.


See you soon!

I'd like to thank JUDITH STRAUSER for the english translation of those words.
A precious friend and a precious help, day after day...
(Un grand merci à Judith pour la traduction de ce post, qui était bien au dessus de mes compétences en anglais. Une aide et une amie précieuse, jour après jour...)

2 commentaires:

  1. Merci de nous communiquer un tel texte : simple, lucide et réaliste...... Plus dur à adapter mais avec un "peu" de volonté, réalisable!! Exercice au quotidient. Bonne journée ma grande et j'espère que ça marche pour toi..... Biz

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  2. Merci Tensaï.
    Rien n'est jamais parfait... j'ai encore des jours de colère et d'auto appitoiement!
    mais une fois choisi, le chemin se trace, jour après jour.

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